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De nombreux syndics sont actuellement démarchés pour mener à bien des programmes de travaux d’économie d’énergie à 0 € comprenant notamment :

  • l’isolation de la dalle haute,
  • l’isolation de la dalle basse,
  • la mise en place d’une pompe à chaleur.

Le montage financier de ces opérations repose uniquement sur l’opportunité actuelle proposée par les certificats d’économie d’énergie (CEE) sur ce type de travaux. L’offre est très alléchante et il peut être tentant pour les copropriétés de s’y engager, pensant qu’elles n’ont rien à y perdre. De plus, l’argumentaire commercial des prestataires est bien rodé et met parfois les syndics sous pression. Nous invitons ces derniers à être particulièrement attentifs avant de faire entrer leurs copropriétés dans ce type de montage.

Voici les questions à se poser.

 

Le devis reçu respecte-t-il le formalisme exigé pour ce type de travaux ?

Bien que le devis soit à 0 €, le formalisme habituel doit être respecté.

Le destinataire du devis doit être le syndicat des copropriétaires (et non le syndic). Il doit donc y avoir un devis distinct par copropriété.

L’entreprise qui réalise les travaux (ou le sous-traitant) doit être mentionnée sur le devis. Elle doit disposer des qualifications requises (RGE notamment, sauf pour le calorifugeage des conduites).

Le poste « description » doit contenir un minimum d’information, notamment sur :

  • Les caractéristiques techniques du matériel et des équipements mis en œuvre.
  • Le cas échéant, les quantitatifs pour la dépose de l’ancien isolant et pour la mise en place du nouveau (m2 d’isolant ou ml par section pour le calorifugeage).
  • Le coût de la main d’œuvre, les frais de déplacement (même si le total est amené à 0 € dans le montant final via la déduction des CEE, ces éléments doivent être valorisés).

Le devis doit également avoir une durée de validité.

Attention aux mentions qui précisent que la contribution financière pourrait varier en fonction de différents paramètres.

Enfin, ces prestataires ne laissent pas le choix de l’entreprise intervenante.

 

Quid de la mise en concurrence ?

FOCUS sur la mise en concurrence

Il est rappelé que l’article 21 de la loi du 10 juillet 1965 prévoit un vote de l’assemblée générale sur le montant des marchés et des contrats :

  • à partir duquel la consultation du conseil syndical est obligatoire ;
  • à partir duquel une mise en concurrence est obligatoire.

L’article 19-2 du décret du 17 mars 1967 dispose que cette obligation de mise en concurrence :

  • s’applique à tous les marchés de travaux et tous les contrats autres que le contrat de syndic ;
  • résulte de la demande de plusieurs devis ou de l’établissement d’un devis descriptif soumis à l’évaluation de plusieurs entreprises.

Lors de l’assemblée générale, si plusieurs devis ont été joints à la convocation, la mise en concurrence impose un vote sur chaque devis et proscrit un vote sur un seul devis (3ème Civ. 9 mars 2022).

Dans une décision très récente, il a également été jugé que le syndic doit être en mesure de prouver la notification aux copropriétaires des conditions essentielles des contrats mis en concurrence (3ème Civ. 15 février 2023).

Autrement dit, la mise en concurrence se fait toujours pour et par devant l’assemblée générale.

Rappelons également que lorsque l’assemblée est appelée à approuver un contrat, un devis ou un marché mettant en concurrence plusieurs candidats, un second vote par application de la « passerelle » ne peut qu’intervenir qu’après avoir voté sur chacune des candidatures à la majorité applicable au premier vote.

 

Comment le chantier va-t-il être préparé et suivi ?

Par ailleurs, des questions se posent quant au suivi du chantier :

  • Un repérage amiante avant travaux (RAAT) doit-il être réalisé ? Pour rappel, la responsabilité du maître d’ouvrage est engagée sur ce point (Décret n° 2017-899 du 9 mai 2017 et Arrêté du 16 juillet 2019)
  • Y aura-t-il intervention de plusieurs entreprises simultanément ? Si oui, un coordonnateur SPS (sécurité et protection de la santé) a-t-il été prévu ?
  • Qui assure la maîtrise d’œuvre ? Cette structure a-t-elle les assurances et qualifications requises ?

 

Quels sont les risques auxquels je m’expose en tant que syndic ?

Là aussi, bien que la prestation soit « gratuite », le formalisme à respecter est le même que pour tout travaux en parties communes.

En cas d’absence de repérage amiante avant travaux alors que c’est exigé, le syndic s’expose à une sanction pénale pouvant aller jusqu’à l’interdiction d’exercer.

Nous rappelons que ce type de travaux sur les parties communes, même « gratuits », sont à décider dans le cadre d’une AG à la majorité de l’article 25. Le syndic qui signerait un devis sans décision préalable de l’AG engagerait sa responsabilité.

Enfin, nous attirons votre attention sur le fait que des travaux réalisés sans respect des normes et des règles de l’art peuvent avoir des conséquences parfois lourdes (exemple le non-respect des normes incendie).

 

Est-ce une opportunité dans tous les cas ?

Rappelons que les programmes proposés dans ce type de démarche sont basés sur l’opportunité d’un montage CEE, et non sur la réalité des besoins de travaux de la copropriété.

Avant tout travaux, il est indispensable de réaliser un état des lieux des besoins (étude énergétique) et d’identifier le scénario de travaux le plus adapté à la copropriété. Sur la base du scénario retenu, il convient de faire appel à un maître d’œuvre et un assistant à maîtrise d’ouvrage pour mettre en place une ingénierie technique et financière adaptée à la situation mobilisant l’ensemble des subventions possibles (et pas seulement les CEE).

En effet, nous attirons votre attention sur le fait que des subventions supplémentaires existent pour les travaux d’économie d’énergie en copropriété et sont basées sur la réalisation de bouquets de travaux permettant :

  • d’atteindre un gain énergétique minimal pour le dispositif MaPrimeRénov’Copropriété
  • d’isoler l’enveloppe du bâtiment à un niveau « BBC-compatible » pour de le dispositif Climaxion

Or, ces conditions ne pourront pas être remplies si des travaux ont déjà été engagés par ailleurs. C’est d’autant plus dommageable si ceux-ci sont inadaptés au contexte énergétique de la copropriété.

 

Article rédigé en partenariat avec :

Emmanuel Jung – Avocat spécialiste en droit immobilier

Qualification spécifique en droit de la copropriété

e.jung@jung-associes.fr

 

 

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